Trois jours de répit. Voilà le peu de temps que le sommet européen du 26 octobre2011 aura permis de donner à la zone euro.
Las. Le doute persiste toujours sur la capacité des dirigeants Européens à trouver une sortie de crise crédible. Il ne sert à rien d’accabler le premier ministre grec, Georges Papandréou, d’avoir jeté de l’huile sur le feu en demandant au peuple grec de se prononcer, par référendum, sur l’accord financier du 26 octobre. En démocratie, il n’y a rien d‘illégitime ou d’irresponsable à demander au peuple souverain de valider un accord international.
Trois constats peuvent être tirés de cette réaction :
1. La consternation et le mépris exprimés par certains dirigeants européens à l’annonce de cette initiative démocratique montrent à quel point les élites européennes sont maintenant éloignées des aspirations des peuples européens. Les citoyens constatent avec dépit que la voix des marchés financiers et des banquiers compte plus que celle des peuples.
2. Les dirigeants européens semblent incapables d’offrir une perspective autre qu’une régression économique et sociale. L’austérité brutale à laquelle les Européens semblent condamnés est perçue comme une injustice. Non seulement elle est inefficace économiquement mais elle est injuste. Les peuples ont l’impression de devoir supporter une double peine. Après avoir subi la crise de 2008, provoquée par une prise de risque inconsidérée de certaines banques (crise des subprimes et son cortège de destructions d’emplois), ils doivent aujourd’hui se serrer la ceinture pour rembourser la dette contractée par les Etats. Or cet endettement a d’abord servi à sauver le système bancaire et contrer les effets de la crise économique. Les efforts demandés au secteur financier (décote de la dette grecque, taxe financière) paraissent bien légers comparés à ceux auxquels doivent se résigner les classes moyennes et populaires.
Le manque d’écoute, de pédagogie et le sentiment d’injustice constituent un cocktail dangereux qui risque de renforcer les courants populistes et extrémistes. Le projet de construction européenne sera malheureusement la triste victime de cette frustration populaire.
3. Le manque d’unité et de solidarité entre nations européennes continue d’affaiblir l’Europe.
La zone euro s’est même résignée mercredi dernier à accepter l’aide proposée par la Chine. La promesse de soutien financier de Pékin n’est évidemment pas aussi généreuse et désintéressée que certains dirigeants européens veulent le faire croire*. Les Chinois vont politiquement acheter le silence de l’Europe sur les violations des droits de l’Homme au Tibet et favoriser la hausse de l’euro face à leur monnaie. La compétitivité européenne en sera d’autant affaiblie.
Il est donc urgent pour les dirigeants européens de se comporter en chefs d’Etat. En pleine tempête, les peuples veulent des capitaines, des hommes et des femmes qui sachent fixer un cap avec crédibilité, constance et fermeté.
La crédibilité n’existe pas lorsqu’on annonce vouloir se désendetter brutalement, en quelques années, alors que l’effort doit être mené sur le long terme tout en renforçant la compétitivité de l’économie (innovation, éducation, soutien aux PME).
La constance, parce qu’un Etat qui modifie sa politique économique et fiscale au gré des caprices des agences de notation ou pour faire des effets d’annonce n’est pas un Etat stratège.
La fermeté enfin parce que les marchés financiers n’ont pas à imposer leur fébrilité aux décideurs politiques.
* « Timeo Danaos et dona ferentes » (Je crains les Grecs, même quand ils font des cadeaux) : paroles des Troyens craignant de faire entrer dans leurs murs le fameux cheval de bois que les Grecs avaient offerts à la ville. Elles expriment cette vérité qu'il faut toujours se méfier de ceux qui jouent les généreux….
Je partage complètement cette analyse.
RépondreSupprimerJe suis effaré du manque de voix argumentant en faveur d'une reprise en mains de la destinée des peuples par ceux dont ce devrait être la raison d'être: les "hommes" politiques, et leurs cousins germains les media.
Le mouvement des Indignés me paraît dérisoire car déstructuré et sans proposition réelle.
Il manque à nos sociétés occidentales des vrais leaders, d'opinion et d'action.
Il existe peut-être ici et là des esprits libres et supérieurement intelligents, capables d'analyser et de fédérer des populations dans une action collective et désintéressée, capables de réveiller les consciences et de faire taire les puissants égoïsmes érigés en valeurs suprêmes chez trop de "citoyens". Mais ces grands esprits: qui sont-ils ? Où sont-ils ?
En tous cas ce ne sont pas eux qui tiennent les micros et les porte-voix aujourd'hui !
Quant à faire entrer les Chinois-Danaos au coeur de nos maisons, quelle erreur énorme et sans retour!
Pour conclure familièrement: "On est mal barrés !"